L’arrivée d’Antoine et de Marion Bancarel depuis le début de l’année au Bailliage, à Salers, a été ressentie comme une bonne nouvelle pour l’ensemble des Sagraniers. Cette localité d’altitude, qui appartient à l’association plus beaux villages de France, dispose d’atouts touristiques certains. Elle également est connue des Français pour avoir donné son nom à une race bovine, un fromage AOC et une liqueur de gentiane. Elle possède d’autres charmants hôtels comme le Saluces, mais le Bailliage reste le cœur qui fait battre le rythme de la localité. Avec ses 25 chambres, dont 5 suites, un spa et une piscine, il dispose d’une structure d’hébergement conséquente, mais surtout, sa table, animée par le chef propriétaire Jean-Michel Gouzon et son épouse Dominique, est réputée dans tout le département et même au-delà pour sa cuisine de terroir. Depuis quelques années, ce membre des Toques d’Auvergne, qui commençait à blanchir sous le harnais, avait fait part de sa décision de vendre le Bailliage.
Une institution
Même si cet établissement fonctionnait très bien, peu de jeunes restaurateurs étaient partants pour succéder à une famille qui tirait le meilleur du potentiel de cet hôtel-restaurant. La personnalité et l’engagement intense de Jean-Michel et Dominique y sont pour quelque chose. Ce sont souvent les hommes qui font la véritable force des institutions. C’est le père de Dominique, Charly Bancarel, qui a créé l’établissement en 1960. Toujours vaillant, à 89 ans, cette figure locale vient de disputer il y a quelques mois le Marathon de Paris. Il fut même à cette occasion le doyen de l’épreuve. Voir le Bailliage partir dans d’autres mains que celles de la famille aurait sans doute représenté pour le patriarche un crève-cœur.
« C’est une année de transition. Il faut que nous réalisions une bonne saison pour être crédibles vis-à-vis des banques »
Mais au début de l’année, il y a eu un heureux dénouement. Antoine Bancarel, petit-fils de Charly et neveu de Jean-Michel Gouzon, a accepté de reprendre le flambeau en douceur avec sa compagne, Marion. Les deux jeunes gens, qui doivent convoler au mois de juillet en justes noces, sont devenus les attachés de direction de l’établissement. Si tout se passe comme prévu, dès 2020, ils se porteront acquéreurs de l’hôtel-restaurant. Jean-Michel Gouzon et son épouse resteront propriétaires des murs. « C’est une année de transition, analyse Marion. Il faut que nous réalisions une bonne saison pour être crédibles vis-à-vis des banques. »
Fermier et aubergiste
Jean-Michel Gouzon a rejoint l’aventure en 1976, en épousant Dominique. Il a abandonné son ancien métier dans le bâtiment et a pris les fourneaux après une formation à l’école hôtelière de Vichy. Depuis lors, il a mis ses talents culinaires au service de l’auberge. Il devrait encore rester derrière les fourneaux jusqu’à 65 ans, avant d’abandonner son tablier de chef à son second, Yvan Limacher. Il interviendra par la suite en tant que conseil. Comme son oncle, Jean-Michel Gouzon, Antoine Bancarel n’avait pas prévu de se lancer dans cette carrière. Fils de commerçants de Salers, propriétaires du café Le Rétro et d’un magasin de souvenirs, le monde du CHR ne lui est pas étranger. Enfant, il donnait volontiers un coup de main dans le café de son père, la boulangerie de ses grands-parents maternels, ou le restaurant de son oncle. Plus tard, étudiant à Rodez, il arrondissait ses fins de mois le week-end comme serveur au Bowling, à Rodez. Mais son véritable rêve était de devenir agriculteur. C’est ainsi qu’après un baccalauréat S, il s’engage dans un BTS en productions animales à Rodez.
Une fois diplômé, il a repris, il y a cinq ans, une ferme appartenant à la famille, avec une quarantaine de vaches salers. « La ferme appartenait à la famille et, lorsque le métayer est parti, je l’ai remplacé, explique le jeune homme. Parallèlement, j’exerçais un deuxième métier en travaillant dans une jardinerie graineterie de Mauriac. » Finalement, il a choisi de démissionner de la jardinerie pour devenir hôtelier-restaurateur et fermier. Un triple métier qui a au moins l’opportunité de synergies. À terme, Antoine caresse le projet de servir les viandes de ses vaches dans le restaurant. Il a ainsi abandonné au début de l’année son emploi à Mauriac pour se consacrer à la gestion de l’hôtel. Il continue cependant de conduire l’exploitation agricole. Aussi l’arrivée conjointe dans les murs de Marion, la future épouse d’Antoine, était-elle indispensable pour asseoir la réussite de ce projet de reprise. Multidiplômée, la jeune femme détient une maîtrise en aménagement des territoires, un DUT en management des entreprises, une licence en communication et un master de droit public. « Comme je ne parvenais pas à choisir entre les deux voies, j’ai suivi les quatre cursus », explique la jeune femme, qui a récemment quitté son emploi de secrétaire de mairie à Saint-Bonnet-de-Salers.
Un casting idéal
Ces diplômes lui sont naturellement précieux pour gérer un hôtel touristique en milieu rural. Elle veille d’ailleurs sur la partie hébergement et sur les questions administratives, alors qu’Antoine se concentrera sur la restauration, qui représente tout de même 60 % du CA de l’entreprise familiale. « Nous avons déjà opéré quelques changements dans la conduite de l’établissement, mais cela ne se voit pas », assure Antoine. Même s’ils disposent d’une faible expérience dans le secteur de l’hôtellerie-restauration, ces deux jeunes gens représentent le casting rêvé pour la reprise du Bailliage. Enfants du village, ils sont déjà réputés pour leur dynamisme et incarnent des personnalités incontournables à Salers et dans les environs. Antoine, notamment, préside la Sagranière, le groupe culturel et folklorique de Salers où il s’illustre à la cabrette. C’est aussi lui qui avait été désigné par l’office de tourisme pour présenter Salers en 2012, lors de l’émission télévisée de France 2 sur le Village préféré des Français.
Le Bailliage
Rue Notre-Dame, 15140 Salers
Tél.: 0471407195