UN ADMINISTRATEUR NOMME POUR 6 MOIS A LA DIRECTION DES EHPAD DE SALERS ET ALLY

28/02/2023

Depuis lundi 9 janvier, la direction des Ehpad d’Ally et Salers est assurée par Loïc Bragard, de la société SPQR Conseil, basée à Lyon. On vous explique pourquoi.

Un arrêté signé par le docteur Jean-Yves Grall, directeur général de l’ARS et Bruno Faure, président du Conseil départemental. Il désigne Loïc Bragard comme administrateur provisoire pour une durée de six mois renouvelable une fois, des Ehpad de Salers et d’Ally, et ce depuis lundi 9 janvier. Mais pourquoi cette décision ? Le directeur général de la société SPQR, Loïc Bragard, explique les raisons de sa présence.

Pourquoi avez-vous été nommé à la direction des Ehpad d’Ally et Salers ? 

Ma lettre de mission, c’est de lever les injonctions sous six mois. Et cela peut être renouvelé une fois, pour six mois. Quoi qu’il arrive, cela ne peut excéder un an. La liste existe, elle est incontestable (lire ci-dessous). Elle fait suite à une inspection qui s’est déroulée au printemps l’an dernier. Certains points ont été corrigés, d’autres ne le sont pas. Ce sont ceux qui sont dans la liste. Le fait qu’ils ne soient pas corrigés a entraîné une décision forte de l’ARS et du Département qui vise à dire : puisque vous n’avez pas su ou pas voulu, on va prendre des décisions.

"On a vite compris qu’avant, il y avait une image positive.  Je ne date pas cet avant, mais l’image s’est dégradée".

Pourquoi votre société a-t-elle été choisie ? 

Aujourd’hui, nous intervenons avec toutes les collectivités, ou établissements publics. Et au fil du temps, l’associatif prenant une part importante, nous avons élargi notre secteur d’intervention. Nous avons un cabinet de stratégie locale. Aujourd’hui, nous sommes des référents sur le secteur médico-social. Nous n’avons aucune crainte à le dire. Au fil des années, il nous a été demandé de faire de l’administration provisoire. À partir de 2017, on a dit oui. Si on gère un établissement, que cela se passe bien, nos conseils sont mieux écoutés, cela donne de la valeur à notre discours.

Où est la directrice ?

Selon Loïc Bragard, la directrice Chantal Fontugne « est toujours en place. Mais elle est suspendue de ses pouvoirs. Elle est présente pour une durée de quelques semaines visiblement. Tant qu’elle est là, j’exige qu’elle continue d’exercer sous ma responsabilité. En fait, elle ne peut plus engager aucune dépense sans ma signature, elle ne peut plus engager personne sans ma signature. Sa seule liberté, c’est la gestion de l’acte quotidien, l’accueil des familles… Elle occupe un poste, elle a une rémunération, donc elle travaille ».

Pour gérer le provisoire, nous avons créé une équipe delta, ce sont les trois personnes citées dans l’arrêté (Pierre-Damien Gerbeaux et Côme Tollet, ndlr). Nous sommes intervenus déjà auprès du Pays de Salers sur la petite enfance, nous les avons accompagnés dans ce projet important. En fait, on travaille avec le Département du Cantal sur d’autres sujets et au fil des discussions, on a échangé. Et nous avons été choisis. C’est une désignation, pas un appel à projet. La particularité, c’est que la désignation est nominative. Il n’y a pas de contrat. L’arrêté stipule que la rémunération est assurée par l’établissement. Je rends des comptes à l’ARS tous les mois.

Insuffisances, carences et non-conformités

Voici des exemples issus de la liste des « principales insuffisances, carences et non conformités constatées à ce jour [qui] ne sont pas levées », selon l’arrêté : « problème de communication de la direction en interne et en externe ; renforcer la fonction de direction ; absence de politique de gestion des risques ; glissement des tâches ; absence d’organisation des soins (sur Salers) ; politique de prévention de la bientraitance à actualiser ; projet d’établissement et de soins à actualiser (à Ally) ; absence d’une véritable politique de gestion des ressources humaines ; absence de politique managériale ; absence de formalisation du circuit du médicament (Salers) »…

Quelle est votre mission ? 

Je deviens l’administrateur provisoire d’une autorisation. Cette autorisation, ce sont les 43 lits à Ally, 52 à Salers. C’est l’administrateur qui a les pleins pouvoirs. Pendant six mois, il n’y a qu’un patron, c’est l’administrateur provisoire. Le conseil d’administration est consultatif pendant six mois. Notre objectif n’est pas de rester. À l’issue, on doit avoir fait en sorte que les injonctions soient levées, et que l’établissement poursuive sa vie. On m’a dit de remettre du dialogue. Comment on fait ? On commence par plusieurs réunions avec le personnel. Redonner l’image attractive des deux établissements. On a vite compris qu’avant, il y avait une image positive. Je ne date pas cet avant, mais l’image s’est dégradée. Redonner de la confiance dans les équipes : valoriser le travail qui est bien fait, reconnaître l’investissement de chacun, être juste au travail. On a six mois, c’est long, mais c’est peu. En six mois, il faut que l’on prenne des mesures fortes. Ça veut dire remettre à jour le planning, imposer des processus, rappeler des règles de bon sens, réorganiser des espaces de travail. Il y a des choses qui peuvent être corrigées assez facilement, mais ce sont des ruptures dans les habitudes de travail, et on ne fera pas sans le consensus du personnel. Depuis une semaine, on travaille sur les roulements, sur les plannings, sur les astreintes, et d’ici deux à trois semaines, on pourra proposer un nouveau planning sur six mois à l’ensemble du personnel. Ce sera un changement radical.

Quid d’une nouvelle direction ? 

La priorité, c’est de se concentrer sur la prise en charge qualitative des personnes accueillies. Or, pour le faire, il faut que les personnes qui les prennent en charge se sentent bien et soient dans un cadre. La priorité, c’est ça. Après, l’autre priorité, ça va être de remettre une direction. C’est nous qui allons travailler à remettre une direction. La désignation, c’est le centre national de gestion qui va réunir un jury et choisir un nouveau directeur ou directrice. Tout ça va prendre quelques mois. L’objectif, c’est qu’une fois que nous serons partis, on nous dise « vous avez bien géré pendant six mois et maintenant ça marche », c’est cela que je veux.

Et les problèmes de personnels ? 

Aujourd’hui, on cherche principalement deux types de personnels : des infirmières diplômées d'Etat au moins un poste sur Salers, et deux sur Ally. À trouver dans les prochaines semaines. Pour l’instant, les deux Ehpad fonctionnement en mode dégradé. Trouver des infirmiers, mais avec un autre enjeu c’est un infirmier coordinateur. C’est-à-dire un Idec. On ne va pas être exigeant à l’excès. Si parmi les infirmiers recrutés, on peut trouver quelqu’un qui a envie de devenir un Idec, ce sera parfait. Ensuite, on est toujours à la recherche d’aides soignants et d’ASH, dans des proportions moindres. Mais on a du turn-over, on est toujours à la recherche de personnes qui ont envie de travailler dans deux beaux établissements. Pour le coup, il y a quand même un cadre sympa. Et les rémunérations ont eu un coup de pouce depuis un an. Après, c’est un constat, nous n’avons plus depuis longtemps de stagiaires, je n’ai pas d’explications et je ne suis pas là pour en chercher. Du coup, on a beaucoup recours à l’intérim. On va prendre contact avec les organismes de formation pour tenter de remédier à cela.

Bruno-Serge Leroy

Le contexte

Février 2021. Chantal Fontugne succède à la direction des Ehpad d’Ally et Salers à Bruno Lhomme, parti à la retraite. Mais en quelques mois, la situation se dégrade. Novembre 2021. Une journée de grève est organisée par le syndicat FO. Mais le dialogue avec la directrice est devenu compliqué.
Janvier 2022. Des familles décident de porter plainte auprès de la gendarmerie pour « maltraitance institutionnelle ». « La gestion est calamiteuse », expliquait le fils d’une résidente.
Mars 2022. L’Agence régionale de santé et le Département mènent une inspection dans l’établissement les 17 et 18 mars. C’est le rapport de cette visite qui conduira à la décision de nommer une direction provisoire extérieure. 9 janvier 2023. L’arrêté n°2022-14-0469, signé par le docteur Jean-Yves Grall, directeur général de l’ARS et Bruno Faure, président du Conseil départemental, désigne Loïc Bragard, comme administrateur provisoire des Ehpad “Le Lizet”, à Salers, et “Les champs fleuris”, à Ally, pour une durée de six mois renouvelable une fois.